FILIERE
Farines d'insectes : accentuer la transparence pour recréer la confiance
Une petite bête partie de Bruxelles peut avoir de grandes conséquences sur une solide machine. En autorisant la commercialisation d'un nouveau type de farine d'insectes, la Commission Européenne a semé le trouble dans l'esprit des consommateurs, déjà perturbés par une période d'incertitudes et d'inflation. Avec plusieurs raccourcis et conjectures, une partie des amateurs de pain pourraient s'en détourner, pensant qu'il contient des insectes.
Le sujet provoque des réactions épidermiques, alors même que plusieurs entreprises travaillent le sujet afin de répondre aux enjeux de l'alimentation du futur : en Europe, la consommation d'insectes est fermement exclue de la culture culinaire. Si bien que, même dégraissés, traités et transformés en farines, il ne serait pas envisageable d'en consommer. Plusieurs médias de "ré-information" selon leur propre terminologie ont saisi le sujet pour utiliser les ressorts émotionnels évidents qui s'y rapportent, en pratiquant une désinformation volontaire.
En cause : l'autorisation accordée par la Commission Européenne à la société vietnamienne Cricket One, lui permettant de commercialiser « de la poudre d’Acheta domesticus (grillons domestiques) entiers partiellement dégraissés ». Cet insecte n'est pas le premier à pouvoir s'introduire dans l'alimentation humaine, comme en témoigne une décision similaire obtenue en 2021 par la start-up Ynsect pour de la farine issue de scarabées. Dans les deux cas, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (European Food Safety Autority, EFSA) a écarté tout risque pour la santé humaine.
Un étiquetage obligatoire pour les produits incorporant des poudres d'insectes
L'utilisation de tels ingrédients doit faire l'objet d'un étiquetage obligatoire, comme l’exige le règlement d'exécution 2023/5, en vertu des potentiels risques d’allergies pour les personnes présentant une intolérance aux crustacés, aux mollusques ou aux acariens. Dès lors, d'éventuelles farines de boulangerie enrichies aux poudres d'insectes seraient immédiatement repérables par les transformateurs... une éventualité qui n'est pas à l'ordre du jour en meunerie, les acteurs de la filière n'ayant pas besoin de ce type d'apport protéique, d'autant plus compte tenu de l'image que cela renverrait.
Malgré le fait que cette autorisation soit un non-évènement sur le plan réglementaire, la farine en question étant exclusivement commercialisée par Cricket One (en faisant donc une micro-niche), les réactions mettent en lumière la défiance que portent les consommateurs vis à vis des entreprises qui façonnent leur alimentation. Plutôt que de minimiser la portée de la chose, il conviendrait plutôt de s'en saisir pour amplifier une dynamique de transparence et de pédagogie autour d'une filière engagée pour des produits aussi sains que durables.
Miser sur un ingrédient de qualité : la transparence
Cette transparence s'impose tout au long du chemin allant du grain au pain, impliquant les agriculteurs, coopératives, organismes stockeurs, meuniers, ingrédientistes et boulangers. L'expertise et la singularité de chacun doivent pouvoir s'exprimer auprès du client final, à la fois par des supports de communication mais également dans la relation de vente entretenue au quotidien, ce qui implique de fournir aux équipes de vente des éléments de compréhension de la filière. Variétés de blé, méthodes culturales, process d'écrasement, ... c'est un savoir-faire 100% français qui s'exprime au travers du pain, avec des grains cultivés et transformés au sein de l'Hexagone. Autant de raisons d'afficher la fierté de proposer des réalisations fabriquées uniquement à partir de grains... sans insecte ajouté.