Teneur en sel du pain
Le pari de demain
Selon Christian Rémésy, ancien directeur de recherche à l’INRA de Clermont-Ferrand, il est essentiel que les boulangers-pâtissiers développent une offre de pains à teneur en sel réduite (16 g par kilo de farine) à côté de leur offre traditionnelle en magasin.
«Pour prévenir l’hypertension artérielle à l’origine de nombreux troubles vasculaires et en particulier des accidents vasculaires cérébraux, il faudrait ingérer le moins de sel possible… au moins ne pas dépasser la dose journalière de 5 g par jour. Aujourd’hui, elle est de plus de 8 g en moyenne dans la population française. On sait à quel point le secteur de la boulangerie trouve utile cet ingrédient sous prétexte d’effet technologique, de maîtrise des fermentations, alors que son rôle principal est de donner du goût au pain lorsqu’il est trop pétri. Le Programme National Nutrition Santé du ministère de la Santé a recommandé une teneur acceptable par la filière de moins de 18 g de sel par kilo de farine à la fin de l’année, mais cette préconisation bien timide n’est pas largement suivie. On peut observer seulement que la proportion des pains très salés a sensiblement diminué. Cependant avec des teneurs souvent proches des 20 g par kilo de farine, la situation n’est pas crédible en termes de prévention de l’hypertension, d’autant que le pain est souvent consommé avec des aliments salés tels que les charcuteries et les fromages ».
16 g de sel par kilo de farine
« Une proposition sérieuse en termes de santé publique serait de généraliser une teneur de 16 g de sel par kilo de farine par voie réglementaire, pour que le pain ne soit plus la source alimentaire majeure de sel. Une teneur de 16 g demeure largement acceptable sur le plan gustatif et permet même de ne pas masquer le vrai goût du pain. Même à cette dose, le sel est pénalisant pour les fermentations, or l’idéal est de pouvoir réduire les quantités de levure et de développer ces fermentations acides si utiles pour dégrader partiellement le gluten. Aujourd’hui, seule une communication claire de la profession pourrait faire évoluer le comportement des consommateurs. Il est important que les artisans boulangers développent une offre de pain à teneur de sel réduite à côté de leur offre habituelle. Ce n’est pas un pari risqué ! C’est une façon de sensibiliser et de familiariser la clientèle à un objectif nutritionnel, de lui donner l’occasion de comparer deux types de pain, d’apprécier le goût de pains moins salés mais mieux fermentés. Après les dérivés du pain blanc très aéré, le choix de la tradition française a été une bonne stratégie pour améliorer la qualité du pain. Une maîtrise nouvelle de la densité des farines (type 80), des teneurs en sel (16 g par kilo de farine) et d’une fermentation panaire plus acide est maintenant indispensable pour asseoir la qualité nutritionnelle du pain ».