New-York Roll, pourquoi ça marche ?

Il fait fureur en boutique autant que sur les réseaux sociaux : le New-York Roll s'est imposé comme la sensation de cette fin d'année en boulangerie. De la pâte levée feuilletée, une crème généreuse, un glaçage gourmand... les ingrédients sont simples. Ils nécessitent cependant une parfaite maîtrise des fondamentaux du tourage et de la réalisation des garnitures, qui comptent parmi les éléments de base de la formation d'un boulanger-pâtissier. 

Ces derniers mois, les tendances autour des produits de pâtisserie et de boulangerie se sont accélérées : cruffin, maritozzi, ... la babka, qui avait marqué le début du cycle, a ainsi été vite balayée aux yeux des consommateurs, dont l'appétit de nouveautés semble à présent irrépressible. Il faut dire que la discipline n'avait pas connu de révolution majeure depuis une longue période, exception faite des viennoiseries colorées qui avaient stimulé les gammes.
Deux dimensions participent à l'attrait de ces nouvelles créations feuilletées : leur visuel particulièrement adapté aux réseaux sociaux, avec des feuillets apparents, une crème qui s'épanche lors de la découpe, et le souhait exprimé par les consommateurs de se tourner vers des produits à la dégustation facile en mobilité, ne nécessitant ni conservation au froid ni couverts. 

Au delà des qualités intrinsèques du produit, c'est un contexte général qui participe à l'adhésion du public autour de ce type de référence : les choix de consommation sont de plus en plus "sociaux", alors même que l'individualisme est exacerbé. La prescriptions de tendances, réalisée par des "influenceurs", qu'ils soient français ou étrangers, participe au développement de ces phénomènes de mode, aussi intenses qu'éphémères. Si on pourrait penser de prime abord que le phénomène est très parisien, il touche en réalité l'ensemble du territoire et plus particulièrement les grandes agglomérations. Le métissage des cultures culinaires, autrefois très spécifiques à un territoire, participe à l'introduction de produits développés bien loin de nos frontières, comme c'est le cas ici : comme son nom l'indique, le New-York Roll est né aux Etats-Unis, sous l'impulsion de la pâtisserie Lafayette (avec l'appellation de Supreme). Aussi, la période de crises et d'incertitudes traversée par l'ensemble des individus et entreprises créé un besoin de réconfort immédiat, lequel peut être procuré par l'alimentation. A l'opposé des injonctions d'une consommation mesurée, saine et responsable, l'appétit se tourne naturellement vers des produits gourmands, riches et régressifs. Autant de cases que cochent les New-York Roll, avec la générosité reconnue des artisans.

Si cela fonctionne aussi bien, c'est justement que les boulangers-pâtissiers n'hésitent pas jouer le jeu des tendances et prennent le pli d'une évolution permanente de leur offre, même si cela peut provoquer à long terme un phénomène d'épuisement pour des équipes déjà fortement sollicitées par la production quotidienne. Si le ralentissement de l'exigence de nouveauté n'est pas à l'ordre du jour, un nouvel équilibre devra être trouvé à long terme. De quoi stimuler encore longtemps la créativité des meilleurs artisans.