COMMERCE
Comment la solidarité en boulangerie peut-elle être source de bénéfices pour l'artisan ?
En proposant sa baguette de Tradition à prix libre sur le mois de novembre 2023, Maxime Lefebvre a réalisé un savant calcul coût/avantages. Si 40% des clients ont fait le choix de la payer 60 centimes d'euro, soit le prix plancher fixé par le boulanger-entrepreneur (correspondant au coût de production), la démarche demeure tout de même gagnante pour sa jeune enseigne, baptisée Mamatte (5 points de vente à Amiens et Lille). Cela lui a en effet permis d'obtenir une importante visibilité médiatique, sans même avoir eu à s'offrir une coûteuse campagne de communication : médias locaux et même nationaux se sont emparés du sujet. Au delà de cet aspect, l'image renvoyée auprès des clients est particulièrement positive : la solidarité ainsi exprimée face à l'inflation compte parmi les facteurs de préférence dans le choix d'un artisan, et demeurera dans les esprits après la fin de l'opération.
Un enjeu d'image essentiel pour garder le contact avec la clientèle
Maxime Lefebvre n'est pas le premier à avoir eu cette idée : si elle avait déjà été mise en oeuvre par des artisans indépendants, les distributeurs l'ont mise en oeuvre depuis plusieurs mois au travers de "prix bloqués" ou d'opérations de vente à prix coûtant, observée notamment sur le carburant. Dans chaque cas, l'entreprise fait l'effort de rogner sur ses marges, tout en retirant un bénéfice par l'augmentation des volumes et l'amélioration de son image. Les réseaux de boulangerie ont également souhaité marquer leur position de "rempart" contre l'inflation, à l'image de Ange avec ses "bons petits prix".
En se basant sur les nouvelles technologies, la solidarité peut également s'intégrer à une logique de fidélisation : à chaque visite, le client participe à une bonne action et se sent ainsi impliqué dans les actions mises en place par son artisan, lequel démontre efficacement ses valeurs. C'est tout l'esprit de la démarche initiée par WhatRocks, qui a déjà séduit de grands noms tels que la Maison Kayser.
Autre élément de la solidarité : le don alimentaire. Cela concerne les produits invendus mais pourtant encore consommables, qui peuvent être distribués auprès des associations et ainsi offrir la perspective d'une réduction d'impôts de l'ordre de 60% du prix du don. Si plusieurs règles sont à respecter (certains produits ne peuvent être donnés, tels que les pâtisseries à base de crème pâtissière crue et de chantilly), avec la mise en place de procédures adaptées et d'une logistique rigoureuse en interne autant qu'auprès des partenaires, cela participe à lutter contre le gaspillage alimentaire, tout en valorisant l'ensemble des productions... avec à la clé un véritable impact économique. C'est également le parti pris par des structures telles que Too Good To Go, en se tournant cette fois vers les particuliers. Les paniers réalisées chaque jour valorisent les invendus tout en témoignant d'une démarche responsable auprès de la clientèle. D'autres initiatives voient progressivement le jour, à l'image de la boutique parisienne Demain, où les productions de la veille, issues de plusieurs boulangeries artisanales, sont rassemblées.