Entreprise
Transmission, nouveaux formats, innovations…les réseaux sont sur tous les fronts
La vingtaine, âge de raison ? Avec l’apparition de l’enseigne Marie Blachère dès 2004, une nouvelle dynamique de concurrence s’est développée en boulangerie artisanale, apportant aux consommateurs du pain fabriqué sur place avec des prix attractifs. À présent, ces réseaux de boulangerie affirment leurs positionnements respectifs, témoignant à la fois de la nouvelle maturité du marché et de la nécessité de se différencier pour continuer à se développer. Ils conservent néanmoins comme point commun un fort dynamisme et la volonté de peser sur la structuration de la filière.
Après les « néo-boulangers », terme souvent associé aux reconversions professionnelles, c’est une « néo-boulangerie » qui s’impose au fil des années. Ses caractéristiques diffèrent de la vision traditionnelle de l’artisan indépendant : structurés et performants, ces acteurs montants renouvellent l’image du métier et s’ouvrent à de nouveaux produits et moments de consommation – en misant massivement sur la restauration rapide –, capitalisant sur les larges horaires d’ouverture du commerce, tout en répondant aux attentes changeantes des consommateurs. Emplacement, expérience au sein du point de vente, méthodes de fabrication et de management… aucun élément n’échappe à ces entrepreneurs, dont les enseignes deviennent rapidement de véritables success stories.
Travel retail et locationgérance, Marie Blachère s’ouvre à de nouvelles pratiques
À l’occasion de Franchise Expo 2023, Marie Blachère présentait deux de ses nouveaux axes de développement. Avec plus de 700 points de vente à travers le territoire français, l’enseigne peut compter sur sa notoriété pour séduire des partenaires positionnés sur des lieux de transit, tels que les gares, stations d’autoroute et aéroports, en France ou à l’international. Ce que l’on appelle le « travel retail » est une cible de choix pour l’enseigne Café de Marie, comme le détaille Jean-Marc Conrad, directeur du pôle Franchise et Restauration au sein du Groupe Blachère :
« Le Café de Marie, c’est une approche du coffee-shop à la française, avec l’offre gourmande reconnue et appréciée de notre enseigne sans les obligations de l’artisanat. Sur des formats de 120 à 150 m2, nous déployons des unités performantes avec uniquement de la cuisson et de l’assemblage (notamment pour le snacking) sur place. Grâce à nos premières unités, nous sommes parvenus à un bon équilibre entre le "grab and go" (produits en libre-service) et le service en vente assistée, ce qui permet d’être efficaces tout en offrant la valeur du service. »
Un modèle rationnel, qui peut également trouver sa place dans les centres-villes, comme à Montpellier (34), où le commerce affiche des performances impressionnantes : sur seulement 66 m², 1.000 à 1.200 clients sont accueillis chaque jour.
Offrir le bon produit au bon prix est le socle du succès de l’entreprise de Bernard Blachère. Elle y ajoute une nouvelle dimension : la transmission :
« Marie Blachère entre dans la seconde phase de son développement avec le lancement d’un dispositif de location-gérance franchisée. Au travers d’un investissement total maîtrisé (aux environs de 310 k€) et d’un contrat de 9 ans, l’objectif de Bernard Blachère est de rendre notre marque accessible à de jeunes profils motivés, qui développeront l’ancrage local de nos unités. »
Les futurs locataires-gérants auront entre leurs mains de nouveaux points de vente, avec un outil de travail performant et leur permettant de mener à bien cette nouvelle aventure aux côtés du groupe. « Nous souhaitons partager et former, en nous reposant sur le savoir-faire acquis au fil des années, tout en garantissant à nos clients des produits de qualité », détaille Jean-Marc Conrad.
Une garantie renforcée par la présence sur le site d’un véritable entrepreneur, dont le niveau d’engagement est naturellement plus fort que celui développé par des salariés.
Ange veille sur son réseau
En plus de déployer la masterfranchise du concept de « brasserie sportive » québécois La Cage, Ange a planifié 35 ouvertures pour 2023, en plus d’un travail de rénovation des points de vente. « Le déploiement de la deuxième version de notre concept de magasin doit être achevé sur l’ensemble du parc d’ici dix-huit mois. Cela nous permettra de continuer à améliorer l’expérience d’achat dans nos boulangeries et à maintenir l’attractivité du parc », souligne Mélanie Kervoern, directrice marketing et communication de l’entreprise.
Comme elle l’a déjà affirmé en annonçant son ouverture dans un nouveau format en plein coeur de la capitale pour septembre 2023, Ange explore différentes façons de se rapprocher encore de sa clientèle : « Un corner Ange a été installé au sein du Carrefour Market du centre Les 2 Ormes à Aix-en-Provence (13), avec le soutien d’une boulangerie située à proximité. Ce format réduit répond à la tendance d’inviter des spécialistes au sein des enseignes de grande distribution, avec tout le savoir-faire et la légitimité d’une entreprise comme la nôtre. »
Des acteurs montants au positionnement marqué
Pour exister face aux enseignes déjà bien implantées, le défi des « nouveaux réseaux » réside dans leur capacité à se différencier en bâtissant une identité singulière. C’est notamment le cas pour la Maison Bécam, qui compte aujourd’hui 20 points de vente, répartis entre Angers, Nantes, Cholet, Orléans ou encore Bordeaux.
Céline et Nicolas Bécam capitalisent sur leur profond investissement dans l’artisanat et la transmission du savoir-faire : « L’ensemble de nos fabrications sont faites maison, à l’image de la viennoiserie. C’est un gage de qualité supérieure pour nos clients et nos partenaires. » Fils de boulanger, l’entrepreneur a déployé un outil de production dédié à la pâtisserie au printemps 2022 et achevé un nouveau tour de table de 2,5 millions d’euros pour accélérer son développement et viser les 50 unités d’ici 2025.
De leur côté, Yoshimi et Rodolphe Landemaine revendiquent avoir « inventé la boulangerie du futur » avec leur enseigne 100 % végétale : « Land & Monkeys, c’est la première boulangerie 100 % végétale à impact positif, avec des farines biologiques et locales, des matières grasses sans huile de palme ou encore des emballages 0 plastique. »
L’ambition est claire : devenir le leader de la boulangerie végétale en Europe, en s’appuyant sur le savoir-faire développé par l’entreprise en matière de création de recettes. L’ensemble des matières premières classiques d’un économat est ainsi remplacé par de nouveaux ingrédients, à l’image de Yumgo, un substitut aux œufs avec des caractéristiques technologiques similaires. L’enseigne compte aujourd’hui 6 points de vente à Paris et en proche banlieue.
Objectif : ouvrir 20 adresses en Province d'ici à 2024, 50 à horizon 2027… et 100 à terme, en suivant un rythme d’ouverture de 10 boutiques par an, en comptant sur l’appui de partenaires franchisés. Les principales villes européennes de plus de 200 000 habitants sont ciblées, sur des emplacements de passage, avec une superficie idéale de 200 m².
Autre acteur au positionnement spécifique, Bun’s Baker ambitionne de créer le premier réseau de boulangeries B2B, avec une offre 100 % dédiée aux professionnels : pain burgers, focaccia, pain hot-dog, pain de mie, pain hallah… autant de références qui peuplent l’offre de l’entreprise, engagée dans une démarche visant à réduire l’impact écologique de son activité grâce à une réalisation sur commande (excluant ainsi tout gaspillage) et une livraison écoresponsable (avec une flotte de livraison dédiée comprenant 50 % de véhicules électriques). Déjà implanté à Bordeaux et Rennes, Bun’s Baker compte accélérer son développement en misant sur la franchise et l’extension de son offre, avec en ligne de mire une présence au sein des 21 métropoles françaises d’ici à 2025.
Former pour se développer, la nouvelle équation des réseaux
La néo-boulangerie, c’est aussi une nouvelle capacité à créer des filières intégrées de formation : les apprentis se voient transmettre les éléments théoriques du métier dans des établissements liés aux réseaux, aussi bien en vente qu’en production (boulanger), avant de les mettre en application au sein des boutiques de la même enseigne. De quoi participer à remplir les importants besoins en main-d'œuvre de ces entreprises au développement continu : Ange recherche ainsi près de 600 apprentis sur toute la France… ce qui l’a incitée à accélérer le déploiement de son école maison, baptisée Idyie.
D'ici à la fin de l’année, la structure développée avec Form’alacarte comptera des implantations à Aixen- Provence, Lille et Bordeaux. Marie Blachère s’est quant à elle reposée sur le savoir-faire des Compagnons du Devoir, en signant un partenariat avec l’association afin de proposer aux jeunes (moins de 30 ans) de devenir boulangers en un à deux ans. Chez Maison Bécam, on mise historiquement sur la transmission et l’apprentissage, ce qui fait de l’entreprise le plus grand acteur de la formation en alternance des Pays de la Loire. De son côté, Sophie Lebreuilly a récemment débuté la première promotion de son académie, avec 10 apprenants, qui découvriront le métier de pâtissier pendant douze semaines au sein du laboratoire d’Etaples (62).
Au-delà des enseignes nationales, les grandes difficultés rencontrées par de nombreux artisans, fragilisés par les crises à répétition, offrent l’opportunité à des entrepreneurs ambitieux de se développer à l’échelon local ou régional : ils pourraient ainsi imposer leur modèle, avec des entreprises atteignant rapidement 5 à 10 points de vente. De quoi poser de nouvelles questions sur la diversité de l’offre boulangère, qui a longtemps entretenu la tradition française.