MARCHÉS
Le réseau de boulangeries Marie Blachère est à vendre
Dans le secteur du pain artisanal, pétri, façonné et cuit chaque jour par des boulangers qualifiés, leur arrivée avait fait l'effet d'un séisme : les nouveaux réseaux de boulangerie ont apporté une alternative sérieuse aux grandes marques que l'on connaissait jusqu'alors sur le territoire.
Parmi eux, le plus en vue avec près de 650 implantations à travers la France, Marie Blachère, propriété du groupe familial Blachère. Une situation qui sera amenée à évoluer dans les prochains mois suite à l'annonce de la mise en vente de l'entreprise : en effet, Bernard Blachère, père de Marie et dirigeant de l'entreprise, a missionné Crédit Agricole CIB et le bureau parisien de Centerview Partners, selon des informations révélées hier par l'AGEFI, pour envisager une telle opération.
La transaction aurait plusieurs effets sur le marché : non seulement elle mettrait fin à une aventure familiale de près de 20 ans, ayant fait naître une des plus belles réussites entrepreneuriale du secteur, mais elle placerait entre de nouvelles mains un acteur majeur de la boulangerie française, en plus d'envoyer un signal fort à l'ensemble des acteurs en place. Avec un chiffre d'affaires annuel avoisinant les 780 millions d'euros et un EBITDA (indicateur proche de l'EBE) proche des 100 millions d'euros, la valorisation du parc, lequel serait en vente dans sa totalité, avoisinerait le milliard d'euros... ce qui laisse envisager une reprise par de grands fonds d'investissement ou un important groupe industriel.
Plusieurs questions se posent naturellement à la suite d'une telle annonce : pourquoi, qui et dans quelle perspective ?
Bernard Blachère est avant tout un excellent commerçant et un bon gestionnaire : il a bâti la réussite de son groupe sur ces piliers et le prouve encore aujourd'hui. Au vu du nombre d'implantations, les perpectives de croissance du parc sont plus limitées, d'autant que la concurrence s'est intensifiée avec l'arrivée de nouvelles marques particulièrement dynamiques (Ange, Feuillette, Firmin, ...). Les points de vente les plus anciens vont nécessiter des investissements pour renouveler le matériel, préserver les conditions de travail et l'attrait de la clientèle. Egalement, il n'est pas à exclure que le modèle de l'enseigne, reposant principalement sur la promotion permanente (avec une mécanique d'un produit offert pour trois achetés) et le positionnement dans des zones commerciales, s'érode dans les années à venir, sous la pression de l'évolution des attentes exprimées par les consommateurs.
Le timing serait alors parfait pour réaliser une telle opération, la valeur du groupe ayant atteint son apogée.
Si les profils évoqués précédemment peuvent se positionner pour une reprise, il leur faudra une bonne connaissance du métier et un véritable projet industriel afin de faire durer la marque, dont le fonctionnement est intimement associé à celui de Grand Frais pour une bonne part des unités, les deux entreprises ayant fait le choix de signer un partenariat dès 2008... opération particulièrement judicieuse, tant les deux enseignes ont profité mutuellement de leur essor respectif.
Une telle acquisition pourrait avoir du sens pour un acteur meunier, afin de générer de la marge par l'aval et valoriser pleinement leur matière première, à une époque où les grands groupes peinent à trouver un modèle rentable. Reste à savoir qui aura les jambes et les reins suffisamment solides pour mener à bien l'opération, qui tient plus du marathon que du sprint tant elle promet de s'étaler sur le temps long.